Le bon gras et l’ivraie

« Le gras, c’est la vie! »

Ainsi s’écrit Karadoc, dans un épisode emblématique de la série Kaamelot. Pourtant, sur nos écrans, pendant les publicités qui entrecoupent les épisodes de la série d’Alexandre Astier, on ne cesse de nous rappeler le contraire, qu’il ne faut pas manger trop gras, trop salé, trop sucré. De façon assez contre-intuitive, ce serait pourtant le grassouillet personnage créé par Alexandre Astier qui aurait raison contre l’opinion commune.

Manger gras serait indispensable à la santé, abaisserait le cholestérol, protégerait des maladies cardio vasculaire et accélérerait la perte de masse grasse? Si une grande partie des régimes ont fait la chasse aux matières grasses, la particularité du régime paléolithique est de leur laisser une large part, mais pas à n’importe lesquelles. Comme souvent, le diable est dans les détails. Assez étrangement, on fait communément une différence  sans réel fondement entre sucres lents et sucres rapides, et l’on condamne par contre le gras sans aucun discernement, mettant dans le même sac des éléments aussi divers que l’huile d’olive, la margarine, le beurre, les avocats, les breadsticks de Pizza Hut, le lard, la côte de boeuf et le saumon fumé. Or, la catégorie des lipides contient une grande variétés de molécules différentes, les acides gras, certains essentiels, d’autre néfastes à l’organisme. Essayons d’y voir un peu plus clair et de discerner « le bon gras de l’ivraie ».

Si le nombre d’acide gras est êxtremement important, on peut, cependant,  les considérer quatre grandes familles de lipides:

  • Les acides gras mono-insaturés. On les trouve principalement dans l’avocat, les oliagineux, ou et certaines huiles comme l’huile d’olive. Ces acides gras ont un effet anti-inflammatoire, qui protège des problèmes artériels. C’est eux que l’on retrouve en grande quantité dans le régime crétois.
  • Les acides gras poly-insaturés. C’est dans cette classe où l’on retrouve les fameux oméga-3 et oméga-6. Chacun de ces deux grands types d’acide gras est important pour l’organisme (ils font partie des acides gras essentiels) mais dans les bonnes proportions! Idéalement, il nous faudrait avoir un rapport entre oméga-3 et oméga-6 à peu près équilibré (rapport de 1:1 à  1:3). Or, notre alimentation actuelle occidentale nous offre un ratio plus proche de 15 oméga-6 pour un oméga-3. Il est donc nécessaire d’avoir une alimentation riche en acides gras poly-insaturés oméga-3 pour rétablir cet équilibre (poissons gras, viandes élevées en pâturage, huiles de poisson et de lin).
  • Les acides gras saturés, que l’on trouve principalement dans les graisses animales et l’huile de coco,  sont une classe controversée. Longtemps considérés par les apôtres des régimes bas en graisse comme le mal absolu en matière grasse, étant considéré comme la cause principale de l’artériosclérose, le statut des acides gras saturés a été revu récemment. Certains acides gras saturés, tel que l’acide laurique, ont, contrairement à ce qui à été dit pendant de nombreuses années, un effet protecteur contre les maladies cardiovasculaires. De plus, ils ont un rôle indispensable pour l’organisme. Environ la moitié des parois des cellules du corps humain sont constituées  d’acide gras saturés.
  • Les acides gras trans-saturés ou hydrogénés n’existent pas à l’état naturel dans les aliments. Ils sont le résultat de processus industriels visant à ajouter des atomes d’hydrogène à la chaîne d’acide gras insaturé, rendant la molécule plus stable Idéal pour les processus de conservation. Le problème est que ces molécules n’existant pas dans la nature, et n’étant apparu que depuis le siècle dernier, notre corps est incapable de les détecter. Ils sont alors absorbées par la membrane des cellules et altèrent le métabolisme de celles-ci. Les acides gras hydrogénés et trans-saturés sont fortement impliqués dans des problèmes tels que l’inflammation, l’artériosclérose, le diabète, l’obésité ou des déficiences du système immunitaire. A éviter absolument. La mauvaise nouvelle, c’est que les acides gras trans-saturés se retrouvent dans la très grande majorité des aliments industriels (plat préparés, sauces, etc…) La meilleure solution pour les éviter? Prendre le temps de préparer soi même ces plats ou préparer des plats plus simples, avec des aliments de base.

A l’époque où vivait ce cher Karadoc, les acides gras trans-saturés n’existaient pas et les oméga-6 étaient en quantité tout à fait raisonnable. Il ne serait pas étonnant que si ce brave garçon n’accompagnait pas si sauvent ces festins de pommes de terres et de pain, il aurait à coup sûr une ligne bien plus athlétique.Son alimentation, certe très grasse en regard de nos standards actuels, lui apportait sûrement l’ensemble des acides gras essentiels pour son organisme, sans les déviances de notre alimentation contemporaine.

Bref, Karadoc avait raison, le gras, c’est la vie!

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